Lib•res réaffirme son opposition ferme à la réforme brutale des pensions des magistrats, imposée par le gouvernement Arizona sans concertation. Elle constitue une attaque directe contre l’indépendance du pouvoir judiciaire. En niant les spécificités des fonctions de juges et procureurs, le gouvernement franchit une ligne rouge démocratique.
On ne réforme pas la justice en méprisant ceux qui la font vivre au quotidien.
Cette réforme aura des conséquences lourdes et durables. Elle entraînera, à terme, une réduction de 30 % à 40 % du montant de la pension pour l’ensemble des magistrats. Elle rendra également inaccessibles des carrières complètes pour de nombreux profils expérimentés ayant rejoint la magistrature après une carrière antérieure, alors même que ces profils sont essentiels au bon fonctionnement des juridictions. Enfin, elle opère brutalement et unilatéralement un changement de cap pour les magistrats actuellement en fonction, sans leur laisser la possibilité de s’adapter ou d’anticiper : un tel changement rompt la prévisibilité nécessaire à toute carrière publique et trahit la parole de l’État.
Cette réforme n’est par ailleurs que la partie émergée de l’iceberg. Depuis des années, la justice belge souffre d’un sous-financement structurel. En 2024, le budget alloué à la justice en Belgique représente environ 0,22 % du produit intérieur brut (PIB). Ce chiffre est inférieur à la moyenne européenne, qui se situe autour de 0,28 % du PIB. À titre de comparaison, l’Allemagne consacre 0,30 % de son PIB à la justice, l’Italie 0,31 %, et l’Espagne 0,34 %.
Ce sous-investissement chronique a des conséquences concrètes et graves : des bâtiments vétustes, des délais judiciaires déraisonnables, des greffes en sous-effectif, et surtout, des justiciables qui renoncent à faire valoir leurs droits. Il s’agit d’une atteinte directe à l’État de droit.
Nous sommes face à une violence institutionnelle constante qui fragilise les plus vulnérables, décourage les professionnels du droit, et entame la confiance des citoyens dans leur État. Une démocratie sans justice digne de ce nom est une démocratie en péril.
Les partis actuellement au pouvoir, MR et Engagés, multiplient les déclarations de principe sur la sécurité et la justice.
Le MR promet que « les peines seront exécutées », tandis que les Engagés plaide pour davantage d’efficacité. Dans les faits, les magistrats manquent pour prononcer les peines, les juridictions croulent sous les dossiers, et les parquets doivent opérer des choix d’opportunité faute de bras. Comment espérer exécuter des peines qui ne sont même plus prononcées ? Comment renforcer la sécurité si les dossiers s’empilent sur les bureaux, si les policiers constatent des infractions qui ne seront pas condamnées et si les magistrats eux-mêmes, démotivés et découragés par des conditions de travails sans cesse dégradées, renoncent à des carrières épuisantes et méprisées ?
Aujourd’hui, des vocations s’éteignent avant même d’éclore. On ne recrute ni ne fidélise des magistrats de haut niveau en les méprisant. La justice n’est pas un luxe. Elle est le ciment de notre démocratie. Elle est un droit fondamental, un rempart contre l’arbitraire, un garant de l’égalité entre les citoyens. Ce n’est plus seulement une question de moyens, c’est une question de dignité.
Lib•res avance différentes mesures pour améliorer les conditions de travail des magistrats et du personnel judicaire :
- Une amélioration des conditions de travail : des charges de dossiers maîtrisables avec un encadrement rigoureux du nombre de dossiers par magistrats, des outils numériques performants et une maintenance informatique réactive, des locaux décents et sécurisés garantissant des conditions de travail et d’audience dignes, une revalorisation des carrières judiciaires pour attirer et retenir les talents ;
- Un renforcement immédiat des cadres des parquets, notamment à Bruxelles, où le cadre est toujours basé sur une population d’un million d’habitants alors qu’on en compte désormais plus de 1,2 million dans une réalité bien plus complexe. Le cadre doit passer de 124 à 150 magistrats ;
- L’ouverture de chambres de comparution immédiate dans les tribunaux correctionnels, pour ne plus laisser les infractions graves sans suite. Le cadre des magistrats dans les tribunaux de première instance sera augmenté de 15 % dans chaque chef-lieu de province et à Bruxelles.
- Le temps n’est plus aux promesses non tenues. Le temps est venu de redonner à la justice les moyens de sa mission. La Belgique mérite mieux.